Ola boys and girls,
Je vais commencer par remercier Anna qui a eu la gentillesse d'uploader ses photos de la soiree de depart sur flickr. Vous les trouverez donc la. Si il y en a parmi vous qui ne veulent pas avoir leur photo sur le net, ca peut s'arranger evidemment.

A part ca, post sans photos aujourd'hui : c'est mon avant-dernier jour en Chine (et je suis de retour a Kunming), puisque je m'envole demain pour Rangoon, et a peu pres rien de particulier ne s'est passe depuis hier (a part une soiree tres sympa vin/fromage avec une mexicaine survoltee rencontree dans le bus, mais ca n'a rien a voir avec la Chine).

Qu'est ce qu'il va me rester de la Chine? Dans les aspects les plus positifs, la cuisine (c'est genial, Pedro tu serais heureux au milieu des 2345 varietes de vapeurs, des hot pots du Sichuan et autres canards pekinois), les gens plutot sympas et curieux (quand bien meme ils meprisent les occidentaux), une civilisation plurimillenaire, un choc culturel assez clair, et un pays d'un dynamisme hallucinant. La Chine est un pays autosuffisant qui n'en a que faire des contingences du monde exterieur (en pratique, c'est pas tout a fait ca, mais c'est nouveau), qui change vite, tres vite, et va finir par imposer son rythme au reste du monde. Bah oui, 20% de la population mondiale, des bleds de 5 millions d'habitants au milieu de nulle part, et dynamique en plus c'est quand meme assez impressionnant.
A cote de ca, il y a une difference enorme entre le nord et le sud, entre les villes et les campagnes, et l'enrichissement du pays ne semble profiter qu'a quelques happy fews. Ils en profitent egalement pour pourrir leur environnement dans des proportions completement hallucinantes (je n'ai vu que la partie emergee de l'iceberg, j'ai rencontre une hollandaise aujourd'hui qui etait venue de Beijing a velo et m'a raconte avoir vu une riviere toute blanche, comme du lait, tellement il y avait de produits chimiques dedans), et restreindre les libertes de la population (le net et la presse, interdire aux gens de demenager/travailler ou ils veulent, obligation de declarer a la police tout etranger qui est chez eux (j'ai rencontre un francais qui s'etait fait "denoncer" alors qu'il restait chez sa copine chinoise, les flics ont debarque), je ne parle pas du China Daily ou de la TV, superbes instruments de propagande ).

Mon seul veritable regret vient du fait que je ne parle quasiment pas chinois, et que je ne peux pas le lire non plus (ca c'est beaucoup plus genant que ce qu'on pense). Je suis persuade que ca m'a coupe de bien des choses, de bien des gens, ayant pu voir de premiere main ce que ca donnait lorsque Rob (le linguiste Kiwi) parlait. Accessoirement la langue est plutot elegante dans sa construction (on assemble des petits morceaux, on ne conjugue rien, et il faut se livrer a une certaine gymnastique intellectuelle pour comprendre) donc c'est frustrant de ne pas pouvoir en profiter. Par exemple, le mot Chine (Zhong Guo) signifie litteralement Milieu (Zhong) Pays (Guo), d'ou l'appellation Empire du Milieu et s'ecrit donc avec deux caracteres (un par "sous-mot"). De la meme maniere, un ordinateur est un cerveau electrique, et un train est un vehicule a feu (aaah la grande epoque des trains a vapeur).
En meme temps, la culture chinoise n'est pas tres "inclusive", au sens ou ils restent entre eux et ne veulent rien avoir a faire avec l'exterieur (cf les chinatowns un peu partout, je ne connais pas d'autre culture qui fasse ca de maniere aussi systematique), les chinois ne veulent pas qu'on parle leur langue (qu'ils pensent etre la plus difficile du monde, ce qui n'est pas exactement vrai - la japonais est bien pire pour nous par exemple), et ne font aucun effort pour comprendre (la prononciation chinoise etant tres difficile, langue tonale + pleins de sons qu'on a pas), donc ca n'arrange rien. Sur ce dernier point, Ben (anglais rencontre ce matin) me faisait remarquer qu'en anglais si un etranger dit "I ate bed yesterday", on va chercher un peu et trouver qu'il a voulu dire "I ate bread yesterday". A l'inverse, ca ne marche pas en Chine. Il me racontait l'histoire de cette fille qui voulait enseigner l'anglais, et qui disait en chinois qu'elle voulait etre prof. Le probleme, c'est qu'elle n'utilisait pas les bons tons (ie elle ne chantait pas comme il faut quand elle parlait, le mot "ma" n'a pas le meme sens suivant si la voix monte, descend, reste plate, etc.), et que du coup tout le monde pensait qu'elle voulait etre un rat (!). Personne n'a jamais reussi a comprendre, il a fallu qu'un chinois anglophone la corrige.

Quoiqu'il en soit, je reviendrai en juin prochain pour me promener dans les regions tabou : le tibet, et le Xinjiang (Ouest de la chine, ils parlent Uighur - ca ressemble au turc-, ont les yeux bleus et ne sont pas asiatiques, utilisent l'alphabet arabe, Beijing n'aime pas et les colonise avec des vrais chinois (des hans) et a ferme la derniere fac il y a quelques annees). Ce cote expansionniste/imperialiste chinois est d'ailleurs assez marque, et le plus bel exemple qu'on m'ait donne est sans doute Taiwan : entre les voyageurs qui se sont vu dechirer les pages de leur passeport avec leur visa taiwanais, le lonely planet confisque parce que Taiwan etait sur la carte (frontiere avec le Vietnam), ou le gros trait au marqueur sur le Phrasebook Lonely Planet de mandarin (achete a Shanghai par des hollandais, Stephanie et Mike, cf photo du train) pour corriger la carte, c'est assez spectaculaire.

La Chine me parait etre au final un pays fascinant, au passe extremement riche et a l'identite tres forte, mais violemment hermetique. Je brule de savoir a quoi le pays ressemblera dans dix ans et suis tres content d'y etre reste six semaines au lieu de trois - faute de quoi je serais passe a cote de beaucoup de choses -, mais de la a dire "China, I Love You"? A voir.